L'utopie ou la mort
Aberration à Malakoff : contre la démolition-reconstruction de la tour INSEE
Collectif | 26 avril 2022
Introduction
À l’opposé d’une démarche qui exploiterait le potentiel du « déjà là » les ministères des Solidarités, de la Santé et du Travail veulent démolir l’immeuble qui hébergeait jusqu'en 2015 les services de l'INSEE à Malakoff, pour reconstruire un immeuble du même usage et de la même surface…
Dans quelques mois débuteront les opérations de démolition de la tour « INSEE », construite en 1974 par les architectes Serge Lana et Denis Honegger au bord du périphérique à Malakoff.
En lieu et place de ce tripode de 32 500 m² de bureaux et de 50 mètres de haut serait édifiée une énième barre, d’une superficie équivalente et toujours à usage de bureaux, qui viendrait prolonger le triste mur de verre qui se dresse aux portes de Paris.
À l’heure où se multiplient les annonces d’un péril climatique imminent, où s’amoncellent les rapports désignant l’activité humaine comme principale source du changement climatique, où s’amenuisent les matières premières, où surgissent les difficultés financières, les ministères sociaux, émanations de l’État français champion des accords de Paris, s’apprêtent à rejouer le film Don’t look up et à illustrer la phrase de Jacques Chirac : « La maison brûle et nous regardons ailleurs. »
Dans quelques semaines, l’État, au mépris de ses engagements forts, de ses condamnations pour inaction climatique, notamment lors du procès de « l’Affaire du siècle », va réduire à néant, en pure perte, un bâtiment qui, de l’avis des experts, présente un potentiel spatial et constructif riche offrant les bases propices à un projet frugal et novateur.
Ainsi, environ 50 000 tonnes de béton et des milliers de tonnes d’acier devront être mises à terre, transportées par près de mille camion et broyées. Tout cela pour reconstruire à la même place un immeuble lui aussi en structure béton, d’une superficie similaire et d’un usage identique.
Nous le savons aujourd’hui que démolir produit massivement du CO2, principal gaz à effet de serre, et construire en produit plus encore. À l’échelle du seul béton armé qui compose ce bâtiment, se sont 6 000 tonnes de CO2 qui viendront s’ajouter à celles déjà émises lors de la construction du bâtiment. Soit l’absorption de CO2 d’environ 250 000 arbres adultes pendant un an ou l’émission de 25 000 trajets aller-retour Paris-Marseille en voiture.
Notre planète a-t-elle besoin encore d’un tel traitement ?
En 2020, nous en étions déjà à + 1°C, et les prévisions montrent qu’un réchauffement de + 1,5°C sera atteint en 2030. À ce rythme et sans agir, nous ne saurons limiter le réchauffement climatique à + 2°C d’ici à 2100.
La transformation du « déjà là » et l’adaptation de l’existant sont des armes de la lutte contre le dérèglement climatique. Paris s’est faite la championne du « plutôt restructurer que démolir » : Jussieu a été réhabilitée, la tour Montparnasse et la tour CIT le seront bientôt.
« Immeuble INSEE pas fini », collectif de citoyens engagés en faveur de la protection de l’environnement, nous disons non ! à ce projet et demandons à l’État d’y renoncer et de s’orienter résolument vers la restructuration de l’immeuble INSEE.