Du lisible au visible

« Des pays habitables » par Joël Cornuault

Martin Paquot | 23 mars 2020

Introduction

Joël Cornuault explore dans ses poèmes (Tes prairies tant et plus, 2018), cultive dans ses essais (Le sentiment des rues, 2017), révèle dans ses traductions (de Kenneth Rexroth, William Gilpin, Andrew Jackson Downing, John Burroughs) une topophilie littéraire. Après avoir animé pendant des années les précieux Cahiers Élisée Reclus, il nous propose un nouveau rendez-vous semestriel intitulé Des pays habitables et sous-titré Naïveté Utopie Exubérance.

Il s’agit d’un rendez-vous d’amis, familiers et étrangers, d’ici et d’ailleurs, d’aujourd’hui et d’hier. Vous pouvez passer une soirée en leur compagnie ou préférer les rencontrer en tête à tête, l’un après l’autre. Venez, ne soyez pas timide, je vous présente…

Margaret Fuller, féministe nord-américaine fameuse, proche d’Emerson et de Thoreau, nous confie quelques-unes de ses lettres d’amour à James Nathan : « J’ai ressenti, ces quatre derniers jours, un désir de votre présence proche de l’angoisse. Vous êtes si étroitement associé à tout ce qu’évoquent à l’esprit ces lieux, qu’il me paraissait impossible de les quitter sans nous y promener en parlant ensemble une dernière fois. »

Saint-Pol-Roux, poète, chaînon manquant entre Mallarmé et Breton, décrit la gorge sèche et l’œil goinfre le paysage qui défile depuis le train Paris-Marseille : « Vins rouges et or des plongeons solaires dans l’onde, vins blancs secs des torrents, chablis des ruisselets, lampées beaune et pommard des trèfles en fleur et des coquelicots, rasades de picolo des toits de tuiles et des murs de briques, petits crus des rivières ».

Alexander von Humboldt, explorateur et savant génial, nous guide dans la jungle nocturne : « Dans chaque buisson, dans l’écorce crevassée de l’arbre dans la motte de terre habitée par des hyménoptères, partout enfin la vie se révèle hautement : on dirait une de ces milles voix par lesquelles la nature parle à l’âme pieuse et sensible qui sait la comprendre. »

Anne-Marie Beeckman, poète « née de la dernière pluie », nous livre quelques pensées sur l’inutilité des voyages : « À laisser aller ainsi le voyage et alors même que la volonté première est de voir comment sont les choses – lieux, paysages, gens – en leur laissant le temps d’advenir, arrive toujours un temps où le lieu flotte, un temps où le temps n’est plus une mesure. et quand sont des notions qui se noient dans la non facture d’être. »

Et Julien Bosc, Élisée Reclus, Laurent Albarracin, Malcolm de Chazal, William Shakespeare, Cécile Even, Bernard Palissy… Les pays sont habitables – tout comme les mots – et chacun de ces auteurs nous le prouve avec amour, gourmandise, écoute et présence.

Des pays habitables, numéro 1 – printemps 2020, Librairie la Brèche / Pierre Mainard, 80 pages, 13 euros.

Pour se procurer la revue
visitez les éditions Pierre Mainard
ou écrivez à librairielabrechevichy@gmail.com